Que signifierait imaginer la psychanalyse autrement ? Ce chapitre s’enquiert de ce que la psychanalyse pourrait avoir à gagner d’une confrontation intellectuelle et éthique sérieuse avec les enjeux épistémiques et ontologiques de la tradition islamique. Je procède épisodiquement et géohistoriquement, avec une référence spécifique au monde arabe et à la France. En premier lieu, j’étudie certains des débats conceptuels autour de la psychanalyse et de l’islam au moyen d’une brève discussion des travaux de Julia Kristeva et de Fethi Benslama. Je récapitule ensuite la littérature sur la psychanalyse et la question religieuse, y compris des travaux récents qui repensent ensemble la psychanalyse et l’islam, non pas comme un « problème », mais comme une rencontre créative au sein d’une confrontation éthique. En troisième lieu, j’en viens à présenter le travail de Sami-Ali dont le recours à la métaphysique islamique et à la théologie apophatique a permis de repenser de manière critique le rôle de l’imaginaire, les mécanismes de projection, et l’épistémologie du non-savoir dans le travail de l’inconscient. Pour finir, je conclus par une critique de l’idée de travail de la culture en tant que travail de laïcité. Plutôt que d’imaginer la psychanalyse comme une discipline séculière sur le plan normatif, cette approche achemine les concepts philosophiques et théologiques islamiques dans le giron de la tradition psychanalytique.